« Sans un
James Bond 007, notre service aurait été la risée de toutes les organisations
de contre-espionnage de la planète »
– M
à Sir James Bond, Casino Royale (1967)
L'histoire fascinante des scenarii dingos auxquels a échappé James Bond... (première partie)
Alors
que les influenceurs du Net hurlent à la trahison après la révélation d'une
nouvelle agent 007 présentée au début du prochain film – en fait un gag de la
production, hélas désamorcé sine die par tous les réseaux sociaux, qui n'avait
d'autre but que de surprendre le spectateur, il apparaît ici intéressant de
revenir sur certaines idées scénaristiques développées au tout début de la saga
– mais jugées alors beaucoup trop iconoclaste pour être transposées à l'écran...
Concernant la ré-attribution du légendaire numéro double zéro 7 à un autre agent, les afficionados savent bien que l'idée ne date pas d'hier...
Dès le début
des années soixante, le célèbre scénariste Ben Hetch est contacté par le
producteur Charles K. Feldman pour adapter Casino Royale, le tout premier
roman de Ian Fleming à l'écran.
Le scénariste
livrera au final quatre scripts complets – lesquels, s’ils ne seront finalement
jamais adaptés en l'état, fourniront néanmoins pas mal de séquences originales
pour le film que l'entêté Feldman finira bien par produire en 1967...
Dans l'une de
ces versions de travail d'ailleurs, le personnage de James Bond... N’apparaît carrément
plus du tout !
Ce premier
script, datant de 1957, remplace en effet l'agent anglais par un... Gangster
américain – un certain Lucky Fortunato - joueur de poker expérimenté (recruté
par le MI6 pour flanquer une raclée mémorable au Chiffre à une table de poker).
Dans une autre de ces toutes premières tentatives d'adaptation du personnage au Cinéma, l'un des scripts proposés suggérait de féminiser l'agent 007 (sous les traits de l'actrice Susan Hayward...).
Et enfin dans un troisième script, l'inimaginable est atteint : si le James Bond 007 original est bien passé de vie à trépas, M a décidé de continuer à utiliser le nom et le matricule de l'agent décédé afin de « désorienter l'opposition ».
La sacro-sainte séquence de présentation de la mission en début de film en devient particulièrement réjouissante lorsque M récapitule tous les traits de caractère propres à un James Bond.
(Extraits du script - « Je suis très content de mon calibre 38 automatique » / « Ça n'ira pas. Voilà les deux pistolets de Bond, Walther PPK et Beretta » « Si vous y tenez. Par contre pas question pour moi de boire de Vodkas Martini. Du Bourbon sec et sans glace, et parfois une bière ou deux ? » « Miséricorde. Je ne ferais aucun commentaire »...).
Une fois correctement 'JamesBondisé' on révèle enfin au nouveau 007 sa mission : éliminer un réseau de corruption par le Sexe, imaginé par le Spectre afin de déstabiliser les gouvernements dans toute l’Europe... On le voit, la frontière avec la parodie outrancière du film de 1967 était bien mince. Le film reprenant donc allègrement l'argument des multi 'James Bond' lancés sur le terrain.
C'était
d'ailleurs l'argument promotionnel numéro un de l'iconoclaste version de Casino Royale en 1967 lorsque le film apparaît enfin sur les
écrans : afin de déboussoler le Smersh, les services secrets britanniques
décident illico de rebaptiser TOUS leurs agents (des deux sexes) « James
Bond 007 ». D'où une certaine confusion dans la direction artistique
du film... Et des teasers posters labellisant TOUS les interprètes (de Dahlia
Lavi à Woody Allen).
"Casino Royale
is TOO MUCH for one James Bond" - la catch phrase promotionnelle ne
laissait aucun doute aux futurs spectateurs.
On se
souviendra même d'un toutou portant une médaille 007 déambulant dans le fameux
casino (sans oublier les indiens parachutistes, décorés de peintures de guerre
007). Bref, l'overdose dans le délire.

Enfin dans le
dernier roman d'Anthony Horrowitz, 'Forever and a Day' - sorti l'année
dernière (pas d'édition française à ce jour), James Bond est envoyé à Marseille
élucider les circonstances de la mort mystérieuse de... 007, dont le
cadavre a été retrouvé dans les eaux du vieux port.
Il en profite pour hériter du numéro de code, devenu vacant par la force des
choses.
En clair, tout ce remue-ménage autour de la pauvre Lashana Lynch ne méritait sans doute pas tant de haine et d'atermoiements...
Kevin Collette

Les 00